Coliving à Paris : dérives, loyers explosifs et encadrement nécessaire

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Coliving & régulation

Coliving à Paris : la fausse bonne idée qui fait exploser les loyers (et pourquoi la Ville sort enfin le bouclier)

Derrière les photos Instagram d’espaces “cosy” et de rooftops partagés, le coliving est accusé de contourner l’encadrement des loyers et de transformer le logement en produit financier ultra-rentable. Paris a réagi avec une politique assumée de « zéro coliving ». Que se cache-t-il derrière ce tournant historique ?

🗓️ Mis à jour : novembre 2025⏱️ Lecture : 7 min

Coliving Encadrement des loyers Conseil de Paris Crise du logement

« Le coliving n’est pas une solution miracle à la crise du logement. Mal encadré, il la nourrit en raréfiant encore un peu plus les logements vraiment accessibles. »

 

Coliving : c’est quoi exactement (et pourquoi ça explose) ?

Le coliving, c’est ce logement partagé « nouvelle génération » qui promet chambre privative, espaces communs design. Et une longue liste de services (Wi-Fi, ménage, conciergerie, événements, etc.).

Sur le papier, l’idée est séduisante pour les jeunes actifs, étudiants internationaux ou freelances qui veulent trouver rapidement un logement « clés en main » dans les grandes métropoles, Paris en tête.

Croissance fulgurante :
  • +70 % de lits en coliving en France entre 2021 et 2023
Région parisienne :
  • 7 500 lits déjà en service, 6 800 en projet en Île-de-France

Selon l’Institut Paris Région, le coliving représente désormais une part majeure des résidences gérées, dépassant même certains segments comme les résidences étudiantes ou seniors. Les investisseurs institutionnels s’y engouffrent, séduits par des rendements de 4 à 8 % dans un contexte de foncier rare et cher.

 

Les dérives du coliving : quand la “communauté” masque une machine à cash

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Le problème numéro 1 : des loyers au mètre carré bien au-dessus du marché, et surtout au-dessus des plafonds de l’encadrement des loyers.

Dans de nombreux immeubles de coliving parisiens, on retrouve la même équation : 10 à 12 m² privatisés (une chambre) pour des loyers compris entre 900 € et 1 200 € par mois, services inclus. Très largement au-dessus des plafonds fixés par l’encadrement des loyers à Paris.

Comment le coliving contourne les règles du jeu

  • Flou juridique : le coliving se positionne entre logement, résidence gérée et parfois même hébergement para-hôtelier.
  • Contournement de l’encadrement des loyers : en facturant des “services” en plus du loyer de base, l’addition finale grimpe bien au-delà des plafonds.
  • Modèle spéculatif : des immeubles entiers sont rachetés, reconfigurés et loués chambre par chambre, avec des marges maximisées.

Plusieurs enquêtes de presse ont documenté les « revers du coliving » : évictions discrètes d’anciens locataires, flambée des loyers après rénovation, et pression accrue sur le parc locatif classique. Dans un marché où chaque mètre carré habitable compte, transformer des logements familiaux ou des immeubles entiers en coliving ultra-rentable est tout sauf anodin.

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Contexte parisien : la capitale connaît déjà une pénurie historique de logements à louer. Des dizaines de candidats pour un même appartement, des familles contraintes de quitter la ville… Dans ce contexte, chaque logement “capté” par le coliving plutôt que par la location classique pèse lourd sur l’accessibilité.

 

Paris dégaine sa politique « zéro coliving » : ce que le Conseil de Paris a vraiment voté

Face à ces dérives, la Ville de Paris a décidé de changer de ton. Le 8 octobre 2025, le Conseil de Paris a adopté une délibération intitulée « Paris, zéro co-living », portée notamment par le groupe Communiste et citoyen.

Concrètement, cette délibération annonce que :

  • La Ville refusera désormais tout nouveau projet immobilier de coliving sur son territoire.
  • Une politique de freinage assumé est mise en place : l’objectif est de stopper la dynamique de croissance du coliving à Paris.
  • Les résidences existantes sont dans le viseur des contrôles municipaux, notamment sur le respect des règles d’urbanisme et de destination des locaux.

Paris devient ainsi la première ville française à afficher une politique aussi claire de « zéro coliving ». Ce geste est à la fois politique (poser une ligne rouge) et symbolique : la délibération n’est pas, à ce jour, un texte de loi nationale, mais elle envoie un signal fort aux investisseurs et au gouvernement.

Des cabinets d’avocats soulignent d’ailleurs que cette décision reste pour l’instant sans effet normatif direct sur tous les montages possibles. Mais elle peut peser sur :

  • Les autorisations d’urbanisme à venir.
  • Les négociations avec les promoteurs qui envisagent des programmes de coliving.
  • Le débat national sur le statut juridique du coliving.

 

Vers un encadrement national du coliving : requalifier, encadrer, protéger

La Ville de Paris ne se contente pas de dire « non » aux nouveaux projets. Elle appelle l’État et le Parlement à intervenir pour :

  • Clarifier le statut juridique du coliving : aujourd’hui, il navigue entre plusieurs catégories (logement, résidence de services, hébergement).
  • Soumettre le coliving à la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs, comme une location classique.
  • Appliquer l’encadrement des loyers lorsque celui-ci existe, notamment à Paris.
  • Respecter les règles de mixité sociale et d’urbanisme prévues dans les PLU.

Au niveau national, des élus comme Ian Brossat ont annoncé leur intention de déposer un projet de loi spécifique sur le coliving, afin de :

  • Mettre fin au flou réglementaire dont profitent certains opérateurs.
  • Rendre le coliving pleinement soumis à l’encadrement des loyers dans les zones tendues.
  • Renforcer la protection des locataires (contrats plus clairs, droits renforcés, encadrement des services facturés).

L’objectif affiché est clair : empêcher que le coliving ne devienne un “nouvel Airbnb”, c’est-à-dire un segment totalement dérégulé qui siphonne progressivement le parc résidentiel.

 

Coliving : menace pour la ville ou opportunité à encadrer ?

Faut-il interdire le coliving ou simplement mieux l’encadrer ? La réponse n’est pas entièrement binaire.

Quand le coliving peut avoir du sens

  • En reconversion de bureaux ou de friches en logements, sans retirer des logements familiaux du parc existant.
  • Avec des loyers réellement encadrés et transparents, services compris.
  • Dans des projets portés par des acteurs d’économie sociale et solidaire, ou des foncières solidaires, où l’objectif n’est pas la rente maximale.

Quand le coliving devient toxique pour la ville

  • Lorsqu’il remplace des logements “ordinaires” dans des quartiers déjà en tension extrême.
  • Quand il déstructure la mixité sociale en ciblant uniquement une clientèle jeune, mobile et solvable.
  • Quand il sert clairement à contourner l’encadrement des loyers pour faire bondir le rendement.

Plusieurs analyses soulignent que le coliving, bien régulé, pourrait jouer un rôle complémentaire dans l’écosystème du logement (notamment pour des publics très mobiles). Mais sans garde-fous, il devient un accélérateur de spéculation dans un marché déjà extrêmement tendu.

 

FAQ – Coliving et encadrement à Paris

🔎 Le coliving est-il interdit à Paris ?

Non, les colivings existants n’ont pas été supprimés du jour au lendemain. En revanche, la Ville a adopté une politique “zéro coliving” pour les nouveaux projets et entend contrôler plus strictement les opérations en cours.

💶 Le coliving fait-il monter les loyers ?

Dans les quartiers tendus, lorsque des immeubles entiers sont transformés en coliving haut de gamme, cela réduit l’offre de logements classiques et peut contribuer à une hausse des loyers au m². Les enquêtes montrent par ailleurs des niveaux de loyers souvent bien supérieurs aux plafonds de l’encadrement.

⚖️ Est-ce que l’encadrement des loyers s’applique aux colivings ?

C’est justement l’un des nœuds du problème : tant que le coliving reste dans un statut hybride, certains opérateurs soutiennent qu’il n’est pas soumis aux mêmes règles que la location nue ou meublée classique. D’où la volonté de requalifier le coliving en “habitation” pour lui appliquer l’encadrement des loyers.

🏡 Existe-t-il des alternatives plus solidaires ?

Oui : habitat participatif, foncières solidaires, logement social et intermédiaire, ou encore dispositifs comme Loc’Avantages pour les propriétaires qui acceptent de louer à des loyers encadrés. Ces solutions priorisent l’accessibilité et la stabilité sur la rentabilité maximale.

 

En résumé : le coliving n’est pas en soi le “grand méchant loup” du logement, mais il est devenu, dans certaines configurations, un symbole de la marchandisation extrême du droit à habiter la ville. La décision du Conseil de Paris ouvre un débat nécessaire : comment encadrer ces nouveaux modèles pour qu’ils servent vraiment les habitants – et pas seulement les tableurs Excel des investisseurs ?

 

Sources principales

  • Conseil de Paris – délibération « Paris, zéro co-living » (8 octobre 2025) – analysée notamment par des cabinets comme Cheuvreux, Gide et Zurfluh-Lebatteux.
  • Articles de presse spécialisés : SeLoger, Boursorama, notaires de France, presse immobilière, documentant la politique de zéro coliving et les chiffres de lits existants / projets en Île-de-France.
  • L’Institut Paris Région – données sur la croissance du coliving et le nombre de lits en Île-de-France.
  • Le Monde – enquêtes sur les revers du coliving, l’absence d’encadrement des loyers sur ce segment et la crise du logement locatif à Paris.
  • Fondation Abbé Pierre – rapports annuels sur l’état du mal-logement en France, rappelant le contexte de pénurie de logements accessibles.

Cet article propose une synthèse pédagogique à partir de sources publiques. Il ne constitue pas un avis juridique. Pour un projet concret (investissement, gestion, bail, etc.), rapprochez-vous d’un professionnel du droit (avocat, notaire) ou de Gestia Solidaire.

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